Echec scolaire et névrose de classe
Je fais tout pour toi et ta réussite, je la veux... et je crains que tu me dépasses et nous "lâches" ou que tu nous quittes
Vincent de Gaulejac explique dans son livre La névrose de classe qu'il est parfois difficile à un bon fils ou à une bonne fille de dépasser le niveau d'études de l’un ou de l’autre de ses parent .
L’approche de la névrose de classe est à la fois contextuelle, psychanalytique, transgénérationnelle et éthologique.
Ces lectures complémentaires relient à la fois le corps, l’espace et le temps ainsi que les dimensions personnelles, familiales et socio-économiques.
Les relations intrapsychiques sont évidemment essentielles mais le transgénérationnel est aussi très attentif à la dimension interpersonnelle (les loyautés invisiblesenvers un parent ou un conjoint).
Le syndrome d'anniversaire et les liens culturels-ethniques sont aussi à prendre en compte.
En même temps, il ne faut pas oublier les conséquences que cela a dans la vie réelle, c'est-à-dire l'aspect existentiel du niveau interpersonnel.
Fuir la promotion
Dans le cadre de l’échec scolaire (parfois inexplicable), la « névrose de classe » peut être comprise comme une tentative inconsciente de fuir la promotion. Par exemple un élève aura une maladie ou un accidentla veille ou le jour de son l'examen, ou il oubliera de remonter le réveil la veille de l'examen, ou oubliera d'emporter ses papiers d'identité, arrivera en retard ou rendra copie blanche de façon incompréhensible alors qu’il est habituellement excellent élève., brillant ou même «tête de classe ».
L’explication que donne Vincent de Gauléjac de ces mécanismes inconscients est qu’une réussite sociale et/ou intellectuelle risquerait de créer une trop grande distance ou même une déchirure radicale entre l’élève et sa famille : ils n'auraient plus les même habitudes, les mêmes goûts, les mêmes manières de table ,le même genre d'ameublement, ni les mêmes vêtements, les mêmes lectures, les mêmes normes, les même besoins et envies, les mêmes loisirs... ; ils n'habiteraient plus le mêmes quartiers ni ne fréquenteraient plus les mêmes personnes, et auraient un niveau financier différent.
Tout cela risque de poser problème et de créer des souffrances, de l'éloignement et un sentiment d'infidélité aux parents, grands-parents et à la classe sociale.
Le fils ou la fille « renonce » inconsciemment par un acte manqué à franchir cette barrière que son père ou les siens n'ont pu franchir.
Ce faisant, il répond inconsciemment au message doublement contraignant (« double bind ») de son père (ou de sa mère) : « Fais comme moi, surtout ne fais pas comme moi »,ou encore à cet autre message « Je fais tout pour toi et ta réussite, je la veux... et je crains que tu me dépasses et nous lâches ou quittes.».
Ces injonctions paradoxales (« double bind ») peuvent aussi expliquer que du côté des parents des comportements inadéquats se produisent comme par exemple qu’un père enlève le fils de l'école pour le mettre au travail alors que l’élève à tout pour réussir ses études .
On constate souvent ce genre d’actes manqués pour une étape décisive d'études (baccalauréat, entrée à l'université, licence, maîtrise, doctorat), ou d'entrée dans la vie active professionnelle (la veille ou le matin d'un concours pour obtenir un emploi ou une promotion par exemple).
Dans ces exemples, la fidélité (la loyauté invisible) aux ancêtres, devenue inconsciente ou invisible et gouverne les individus et leur destin.
Il est essentiel de rendre visible, de prendre conscience et de comprendre ce qui nous oblige, ce qui nous gouverne et de recadrer cette loyauté, pour redevenir libre de vivre sa vie.